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Ballet Paquita

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Ballet Paquita  Empty Ballet Paquita

Message par ileana Aujourd'hui à 18:54

Puisqu'on va bientôt donner Paquita, voici ce qu'écrit à son fils mon héro imaginaire, Emilien de Vaudreuil:

Paquita, une jeune danseuse enrôlée dans une tribu de gitanos

Emilien de Vaudreuil à son fils Charles
La Boissière, le 13 janvier 1870

Mon cher fils,

Quelles agréables vacances de Noël j’ai passé en ta compagnie et en celle de Marie-Amélie ! C’est avec un peu de tristesse que je vous ai vu partir tous les deux pour regagner, toi Paris, et notre pensionnaire son couvent.

Allons ! Il nous reste les lettres, et voici le moment venu de te parler du très charmant ballet de Paquita, nouveau grand succès de Carlotta Grisi après Le Diable à quatre.
M. Léon Pillet, qui était toujours le directeur de l’Opéra, avait consacré mille soins et dépenses extraordinaires pour monter son nouveau spectacle. Le luxe des décors, celui des costumes, le soin de la mise en scène, et par-dessus tout le concours de la Carlotta, tout était réuni pour donner la plus grande vogue au nouveau ballet espagnol.

Cette fois, le spectateur était transporté à Saragosse, à l'époque de l'occupation napoléonienne. L’Espagne, qui avait servi des années plus tôt de cadre au Diable boiteux, était un lieu fort bien choisi, car pas une terre au monde ne semble mieux disposée pour les amours et pour la danse que ce pays tout paré pour une fête perpétuelle.

Au premier acte, nous faisons connaissance avec Paquita, une jeune danseuse qui se trouve enrôlée on ne sait comment dans une tribu de gitanos dont le chef a pour nom Inigo. Cet Inigo voudrait se faire aimer de la jeune fille, chose à laquelle il tâche de parvenir en la brutalisant sans cesse. Dans ces conditions, rien d’étonnant si Paquita se laisse charmer par la prestance d’un bel officier de l’armée française, Lucien d’Hervilly. De son côté, le jeune homme, comme il est de coutume dans l’art chorégraphique, s’éprend instantanément de la jolie gitane. Se détournant sans plus réfléchir de sa fiancée, la fille du gouverneur Don Lopez de Mendosa, le bel officier déclare à Paquita son intention de l’épouser.
- Vous épouser ? Vous n’y pensez pas ! Cela ne se peut pas, regardez ma modeste robe ! rétorque par gestes la jeune fille effarouchée.
Furieux de voir sa fille dédaignée, Don Lopez conçoit un plan machiavélique : prenant à part Inigo, fou de jalousie, il lui propose de se débarrasser de Lucien. C’est compter sans Paquita, la fine mouche, qui a tout entendu et se demande comment avertir Hervilly du danger. Celui-ci survient justement et demande l'hospitalité, qu'Inigo lui accorde avec empressement. Le perfide gitan fait servir le souper, glissant quelque poudre somnifère dans le vin de son hôte. Mais Paquita veille et intervertit prestement les gobelets, de sorte que c'est finalement Inigo qui boit le verre destiné à sa victime. Après toutes ces péripéties, l’histoire trouve son dénouement lors d’un bal donné par Don Lopez. Les coupables sont dénoncés et arrêtés, tandis que - coup de théâtre ! - Paquita découvre, grâce à un médaillon qu’elle porte depuis sa naissance, qu’elle est de noble origine. Elle est même en réalité la cousine de Lucien ! Rien ne s’oppose donc plus au mariage des tourtereaux.
C’est à M. Paul Foucher, beau-frère de M. Victor Hugo, que l’on devait ce libretto, qui rappelait celui de la Gipsy et maintes histoires d’enfants enlevés par des bohémiens puis heureusement retrouvés. Cette trame d’une grande invraisemblance, mais tout à fait limpide, offrait des situations aussi pittoresques que dramatiques. La scène dans la taverne d’Inigo, en particulier, donnait lieu à une savoureuse pantomime entre le fourbe gitan, Lucien d’Hervilly et Paquita.
Mais je m’aperçois qu’il se fait tard et voici la fatigue qui me gagne. Je te laisse pour ce soir et reprendrai la plume demain…
Emilien de Vaudreuil.


Ballet Paquita  Ax_paq10
Costume de Paquita pour Calotta Grisi


Des sauts légers qu’elle exécutait à cloche pied sur la pointe de l'orteil

Emilien de Vaudreuil à son fils Charles

La Boissière, le 14 janvier 1870

Mon cher fils,
Me voici, reposé par une bonne nuit, prêt à poursuivre mon récit du charmant ballet Paquita.
C’est M. Deldevez qui fut chargé de broder une partition sur le libretto de M. Paul Foucher. Il sut, ma foi, produire une musique qui, à défaut d’originalité, ne manquait ni de rythme ni de couleur, inspirant à M. Mazilier des chorégraphies des plus réussies.
Le premier pas du premier acte, où Paquita évoluait au milieu d’une gracieuse ronde de comparses féminines, était délicieusement vif et alerte. Puis il y avait le Pas des manteaux, exécuté par des femmes sanglées dans de coquets costumes de toréadors. Je te laisse imaginer le succès que remporta ce gentil bataillon ! Les danses espagnoles dans leur ensemble furent vivement applaudies. Il en fut de même pour le grand bal du second acte, qui offrait le spectacle brillant de toutes les danses les plus célèbres de l’époque impériale, avec contredanse, gavotte et allemande.
La force de M. Mazilier avait été de concevoir une alternance des plus agréables entre les pas espagnols, la pantomime, les danses de salon en vogue sous l’Empire, et les pas propres à mettre en valeur le talent de la Carlotta. Car ce fut elle, une fois de plus, la grande triomphatrice du ballet. Je me souviens en particulier avoir été émerveillé par des sauts légers qu’elle exécutait à cloche pied sur la pointe de l'orteil, avec un mouvement d'une vivacité éblouissante, et qu’elle répétait huit ou dix fois. Dans plusieurs scènes, elle avait ainsi des pas d’une hardiesse et d’une difficulté inimaginables, qu’elle exécutait comme en se jouant, avec toujours son gracieux sourire aux lèvres. Dans le pas qui terminait le ballet, elle fut tout particulièrement applaudie et rappelée par deux fois. Et non seulement la Carlotta dansa à la perfection, mais son jeu était si pétillant et son mime si naïf et si plein de nature, qu’ils avaient l’art de faire accepter les rebondissements les plus incongrus du libretto.

De son côté, M. Petipa, dans le rôle de Lucien d’Hervilly, n’avait pas grand-chose à danser, mais fut très applaudi pour sa belle prestance d’officier et pour sa pantomime. M. Elie, à qui reviennent de droit, à l’Opéra, tous les rôles de bandits, fut excellent dans celui d’Inigo, et M. Coralli se montra très à son affaire dans le rôle de Don Lopez. Melles Dumilâtre et Plunkett, qui exécutèrent ensemble un très charmant pas de deux, furent particulièrement appréciées par le public et la critique, de même que Melle Dimier en danseuse espagnole et Melle Caroline en toréador. Toutes ces demoiselles du corps de ballet furent d’ailleurs excellentes dans le Pas des Manteaux, dans les danses espagnoles et dans tous les pas de ce ballet si bien enlevé.
Pour achever un récit déjà long, je te dirai, mon cher fils, que tout le spectacle se déroulait dans un luxe de décorations tour à tour pittoresques ou splendides, comme la perspective de l’immense salle de bal imaginée par les habituels MM. Philastre, Cambon, Séchan, Diéterle et Despléchin. De leur côté, MM. d’Orschwiller et Lormier s’étaient surpassés, avec une variété de costumes d’une richesse inouïe.

Le ballet Paquita fut représenté rue Le Peletier pour la première fois le 1er avril 1846, et donné trente-trois fois jusqu’en 1851 ; après quoi, oublié par l’Opéra, il s’en fut poursuivre sa carrière en Russie, ce qui fait que tu ne l’as jamais vu.

Ce sera tout pour ce soir, en espérant que tu prendras autant de plaisir à lire mes souvenirs que j’en ai pris à voir Paquita en son temps.

A bientôt mon cher fils. En attendant ta prochaine lettre, je t’envoie toute mon affection.

Emilien de Vaudreuil
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Date d'inscription : 15/11/2024

Cathy aime ce message

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